PHILIPPE CARON LEFEBVRE

Cette pièce est un désir

Galerie Nicolas Robert
2021, Montreal, QC

(en)

Galerie Nicolas Robert is proud to present Cette pièce est un désir, the artist's second solo exhibition at the gallery. Domestic objects have occupied an unsuspected part of the daily life of many people over the past year. Faced with a need to envision the future, Philippe Caron Lefebvre locked himself in the studio and turned fiction into refuge by creating a speculative domestic ecosystem.

With this body of work, the artist continues his reflections on various biological mechanisms such as mimicry and morphological evolution. In his practice, these processes take the form of material experimentations entailing a juxtaposition of noble and trivial materials, manufactured and recycled devices, as well as natural and artificial effects. To do this, Caron Lefebvre uses both artisanal and technological strategies and combines ornamental and utilitarian modes. The sculptures, ceramics, drawings and collages on display are as much the protagonists of (science-)fiction as is this installation. A heterogeneous universe embodying the freedom of an alternative future (a present). Thus, the recurring motifs within Philippe Caron Lefebvre's practice, such as the sharp point, the orifice, and the grid, form a lexicon of formal and narrative strategies through which it is possible to apprehend the reel.


(fr)

La Galerie Nicolas Robert est heureuse de présenter Cette pièce est un désir, la deuxième exposition individuelle de l’artiste avec la galerie. Les objets domestiques ont occupé une part insoupçonnée du quotidien de bien des gens dans la dernière année. Devant le besoin de se projeter, Philippe Caron Lefebvre s’est enfermé dans l’atelier et a fait de la fiction un refuge en créant un écosystème domestique spéculatif.

Dans ce corpus, l’artiste poursuit ses réflexions sur différents mécanismes du vivant comme le mimétisme et l’évolution morphologique. Celles-ci prennent entre autres la forme d’expérimentations matérielles, notamment par la juxtaposition de matières nobles et triviales, de dispositifs fabriqués et récupérés, d’effets naturels et artificiels. Pour ce faire, Caron Lefebvre use autant de stratégies artisanales que technologiques, et amalgame les modes ornementaux et utilitaires. Les sculptures, céramiques, dessins et collages présentés sont autant de protagonistes de la (science-)fiction qu’est cette installation. Un univers hétéroclite incarnant la liberté d’un futur (un présent) alternatif. Ainsi les motifs récurrents dans la pratique de Philippe Caron Lefebvre comme la pointe, la percée et la grille forment un lexique de stratégies formelles et narratives à travers lesquelles il est possible d’appréhender le réel.

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Comissaire Charlotte Lalou Rousseau


CETTE PIÈCE EST UN DÉSIR.
Pièce en un acte pour public, objets, ornements et spéculations.
Public joue son propre rôle. Il pénètre un espace domestique alternatif.
Le poids de ses pieds sur le plancher est inhabituel, amorti, doux. Il se surprend à se demander s’il pourrait en faire installer chez lui.
Il remarque l’affiche d’un film au mur.
PUBLIC. – « Torpeur domestique »... Tiens, ils ont fait un remake de ce film d’horreur des années 1960.
Un objet brillant capte son regard, l’attire, le séduit.
PUBLIC. – J’essaie de faire pousser ce cactus à la maison, sans succès. Il doit manquer de soleil. Peut-être que je l’arrose trop...
L’AUTRICE. – Je pense qu’il a besoin de jaser, ton cactus. PUBLIC. – Excusez-moi, avez-vous l’heure?
CACTUS. – Certainement, il est une heure moins quart.
Un personnage au costume anguleux et raide émerge du plancher et s’avance vers Public.
ALTER EGO. – Cette pièce est un désir. Cette fiction est un refuge. Cette conversation est un écosystème. Ce futur alternatif est un présent. J’offre le café.
Alter Ego tend à Public un breuvage chaud dans un récipient en céramique iridescente, ainsi qu’un livre.
L’AUTRICE. – Ah! j’ai lu ce manga récemment : le protagoniste épris de liberté lutte contre le caméléon en quête identitaire. Tout le monde reste à la maison sous une couverture lestée et personne ne meurt à la fin.
PUBLIC. – Excusez-moi, avez-vous l’heure?
ALTER EGO. – Certainement, il n’est jamais trop tard.
Public cherche un endroit où s’asseoir.
L’artiste au travail perce un fauteuil à rythme régulier. Le fauteuil prend vie.
L’ARTISTE. – Les trouées transforment le regard.
PUBLIC (à lui-même). – Vaut mieux ne pas déranger le fauteuil pendant sa mue de quincaillerie.
PUBLIC. – Excusez-moi, avez-vous l’heure?
L’ARTISTE. – Certainement, il commence à faire noir.
Au loin, le bruit d’un tracteur à chenilles.
ALTER EGO. – Les robots-serviteurs sont devenus réfrigérateurs intelligents. Venant des coulisses, les chocs sourds d’une boule de démolition.
L’AUTRICE. – Les voitures volantes d’hier font aujourd’hui des coups de pub dans l’espace.
Sur scène, le tonnerre gronde et un éclair frappe le trou du souffleur. 
LE SOUFFLEUR. – On a tous un téléporteur dans la poche arrière.
Sept ventilateurs industriels se mettent en marche.
L’ARTISTE. – Une architecture autonome épouse la forme du durian. Le silence du désert s’étend à perte de vue.
CACTUS. – Le positivisme bat son plein chez les humains.
Public toise la salle à la recherche d’un récit utopique auquel se raccrocher. André Breton entre côté jardin, d’un pas inquiétant.
ANDRÉ. – Il fait beau comme la rencontre fortuite sur un panneau de polystyrène d’un bloc d’argile et d’une feuille d’or, ne trouvez-vous pas?
Dehors, zawa zawa.
PUBLIC. – Excusez-moi, avez-vous l’heure? 
ANDRÉ. – Certainement, il est cent ans plus tard.
Public en profite pour se recroqueviller sur son téléphone. Les résultats de sa dernière recherche s’y trouvent toujours. Rassuré, il prend une gorgée de café.
FIN. 
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